Vente en ligne de masque en tissu : l’acheteur peut-il se rétracter ?
Camille Merlet
15 Mai, 2020

PROFESSIONNEL

Masque non sanitaire en tissu vendus en ligne

le client peut-il exercer son droit de rétractation ?

CAMILLE MERLET / MAËLIE AZAIS 15 MAI 2020

Masques en tissu ou masques non sanitaires : Qu’en est-il du droit de rétractation ?

Des couturières, des autoentrepreneuses, des créatrices etc. ont commencé a confectionner des masques en tissus ou des masques non sanitaires suite à l’incertitude quant à l’approvisionnement en masques de la population. Une question revient souvent sur la possibilité ou non pour le client qui commande en ligne des masques en tissu ou non sanitaires de faire jouer leur droit de rétractation et ainsi annuler la vente en ligne.

Pour ce faire, les masques en tissu ou masques non sanitaires peuvent être vendus en ligne, contrairement à la vente de masque à usage sanitaire en vertu du décret n°2020-190 du 3 mars 2020. Si l’acheteur est un consommateur par opposition au professionnel, il a le droit de faire jouer son droit de rétractation de 14 jours prévu par le droit de la consommation.

Il faudra rédiger des conditions générales de ventes précises détaillées et surtout personnalisées par un avocat en droit des contrats.

Mais existe-t-il un droit de rétractation pour la vente à distance des masques en tissu ?

 Le principe du droit de rétraction

Le droit de rétractation offre la possibilité au consommateur de revenir sur son consentement d’achat, dans un délai légalement ou contractuellement prévu, de retourner au vendeur le produit et ce sans justification, et de se faire rembourser les sommes versées.

L’article L.221-18 du Code de la consommation permet au consommateur, qui a acheté un produit à distance, notamment en ligne, d’exercer son droit de rétractation de 14 jours à compter de la réception dudit produit. Le vendeur informe le consommateur, en principe dans ses conditions générales de ventes (CGV), de son droit de rétractation. Il l’informe notamment du délai légal de rétractation. Le vendeur n’a pas la possibilité de réduire ce délai, en revanche, il peut offrir au consommateur un délai plus long. Ce délai devra nécessairement apparaître dans les conditions générales de ventes (CGV). Le vendeur l’informe également des conditions de rétractation, notamment si les frais de retour sont à la charge du vendeur ou du consommateur.

Enfin, il l’informe des modalités de rétractation, en principe par la mise à disposition d’un formulaire de rétractation, mais le consommateur peut utiliser tout autre moyen de rétractation tant que celui-ci est clair et précis. Lorsque le consommateur a usé de son droit de rétractation, le vendeur doit nécessairement le rembourser par le biais du même moyen de paiement qu’il a utilisé pour l’achat du produit, sauf accord exprès du consommateur.

 

Couturière fabriquant un masque en tissu ou masque non sanitaire

Le droit de rétractation et les professionnels

Il est nécessaire de préciser que certains professionnels peuvent se voir appliquer ce droit. L’article L.121-16-1 du code de la consommation prévoit, en effet, que le délai de rétraction est applicable entre deux professionnels, dès lors que le contrat conclu à distance, en l’espèce le contrat de vente de masques en tissu, n’entre pas d’une part, dans le champ de l’activité principale de l’acheteur professionnel, et d’autre part, que le nombre de salariés qu’il emploie est inférieur ou égal à cinq.

De sorte que, lorsqu’une Société ayant au maximum cinq salariés, et souhaite commander des masques en tissu pour que ces derniers soient protégés, le droit de rétractation s’applique.

Un rappel des applications du droit de rétractation devra figurer dans vos conditions générales de ventes (CGV) de masques en tissus ou masque non sanitaire. Un avocat en droit des affaires saura vous accompagner et vous rédiger vos conditions générales de ventes (CGV)

En d’autres termes, le droit de rétractation a pour but de protéger le consommateur, et les professionnels ayant peu de salariés et les conditions générales de ventes (CGV) devront faire un rappel de ce droit pour le consommateur.

Les exceptions du droit de rétraction

L’article L.221-28 du Code de la consommation prévoit treize exceptions à ce principe de rétractation, seules deux d’entre elles méritent d’être soulevées, à savoir celles relatives aux contrats de vente en ligne :

  • « de fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés » (1) ;
  • « de fourniture de biens qui ont été descellés par le consommateur après la livraison et qui ne peuvent être renvoyés pour des raisons d’hygiène ou de protection de la santé » (2).

L’exception du masque en tissu personnalisé

Lorsque le consommateur choisit de personnaliser le masque en tissu qu’il a commandé, par exemple avec l’apposition d’un logo ou d’une photographie, l’exception au droit de rétractation s’applique. Le consommateur ne pourra pas restituer le masque au vendeur, quand bien même que le délai de rétractation ne soit pas écoulé.

Mais qu’est-ce que la personnalisation du produit ?

La Première Chambre civile de la Cour de cassation a jugé le 17 janvier 2018 que le produit acheté n’est pas personnalité dès lors que, les options commandées par le consommateur ne permettent d’effectuer aucun travail spécifique pour le vendeur et ne suffisent pas à faire du produit un bien nettement personnalisé. (Cassation Ch.civ1 17 janvier 2018 n°17-10255).

Il est nécessaire de préciser dans vos conditions générales de ventes (CGV) que la condition personnalisation permettant la renonciation au droit de rétractation est uniquement applicable au produit, et non à un service (Cour d’appel de Pau, ch.1, 8 octobre 2019 n°18/01517).

Toutefois, le vendeur a une obligation légale d’information du consommateur de la non-application du droit de rétraction pour cause de personnalisation du produit, et ce avant même l’achat du produit. Cette information peut par exemple se trouver directement dans les conditions générales de vente. Cette obligation d’information est remplie si elle figure sur vos conditions générales de ventes (CGV).

L’exception du descellement de l’emballage du masque en tissu et son impossibilité d’être renvoyé pour cause d’hygiène ou de protection de santé

Selon le texte mentionné ci-dessus, lorsque le bien commandé est descellé et qu’il ne peut de ce fait être renvoyé pour raisons d’hygiène ou de protection de santé, le consommateur ne bénéficie pas de son droit de rétractation.

Toutefois, il faut prendre cet avis avec précaution car ce n’est pas ce qui a été jugé récemment par la Cour de Justice de l’Union Européenne (ci-après « CJUE ») le 27 mars 2019 (CJUE, 27 mars 2019, C-681/17, Slewo c/ Sascha Ledowski).

Elle a considéré que, « ne relève pas de la notion de « biens scellés ne pouvant être renvoyés pour des raisons de protection de la santé ou d’hygiène et qui ont été descellés par le consommateur après la livraison », au sens de cette disposition, un bien tel qu’un matelas, dont la protection a été retirée par le consommateur après la livraison de celui-ci ».

Selon elle, « étant donné qu’en cas de vente à distance le consommateur n’est pas en mesure de voir le bien qu’il achète avant de conclure le contrat, il devrait disposer d’un droit de rétractation. Pour la même raison, le consommateur devrait être autorisé à essayer et inspecter le bien qu’il a acheté, dans la mesure nécessaire pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien. » (…) et que « même en cas de contact direct de ces biens avec le corps humain, il peut être présumé que le professionnel est en mesure de rendre ceux-ci, après leur renvoi par le consommateur, au moyen d’un traitement tel qu’un nettoyage ou une désinfection, propres à une nouvelle utilisation par un tiers et, partant, à une nouvelle commercialisation, sans porter préjudice aux impératifs de protection de la santé ou d’hygiène ».

Elle précise cependant « qu’il n’en demeure pas moins que, conformément à l’article 14 de la directive 2011/83, le consommateur répond de toute dépréciation d’un bien résultant de manipulations autres que celles nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement de celui-ci, sans qu’il soit pour autant déchu de son droit de rétractation ».

La CJUE se montre relativement protectrice envers le consommateur et refuse qu’il puisse être déchu de son droit de rétraction. En effet, elle estime que le vendeur a la possibilité de commercialiser à nouveau le produit dont l’emballage a été ouvert, et ce en utilisant toutes les conditions d’hygiènes suffisantes et sécurisantes pour le nouvel acheteur.

Mais dans le contexte actuel de crise sanitaire du fait du Covid-19, il serait vraisemblablement mal venu qu’un masque en tissu ou masque non sanitaire déballé puis essayé par le consommateur puisse être retourné au vendeur, pour être ensuite remis sur le marché.

En effet, l’objectif premier reste d’éviter toute propagation du virus et de mettre en péril la santé de la population.

Cependant, en cas de contentieux, il est possible que les juridictions françaises s’appuient sur la décision de la CJUE.

Enlever l’emballage de protection du masque en tissu pourrait empêcher l’exercice du droit de rétractation

Pour conclure, deux possibilités s’offre au vendeur pour que le droit de rétractation ne s’applique pas.

  • mettre tout en œuvre, en cas de retour de masque en tissu, pour que les conditions d’hygiènes soient respectées, afin de ne pas priver le consommateur de son droit de rétraction ;
  • invoquer l’article L.221-28 5° afin de déchoir le consommateur de son droit de rétraction, si le masque ne fait preuve d’aucune personnalisation.

Le cabinet Constance Avocats vous assiste dans la gestion de votre société au quotidien et vous assiste dans la rédaction de vos conditions générales de ventes (CGV). Toutes les prestations font l’objet d’un devis et d’une étude de votre dossier approfondie.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

CONSTANCE
AVOCATS

2 rue Edouard Delanglade – 13006 Marseille
contact@constanceavocats.fr
Tel : 04.84.89.40.36
Fax : 04.84.89.40.47

RÉSEAUX SOCIAUX

© 2021

Découvrez également…

Exercice illégal de la médecine pour les actes de cryolipose et de micro-needling

Exercice illégal de la médecine pour les actes de cryolipose et de micro-needling

La médecine esthétique doit être pratiquée avec précaution et par des professionnels qualifiés, c’est l’enseignement qui est donné par un arrêté très récent de la Cour de Cassation sur cryolipolyse et de micro-needling . En cas d’erreur médicale, il est essentiel de se faire accompagner par un avocat spécialisé en droit de la santé pour défendre ses droits et obtenir réparation des préjudices subis.

lire plus
Le GIE (Groupement d’Intérêt Economique) :

Le GIE (Groupement d’Intérêt Economique) :

Le Groupement d’Intérêt Économique (GIE) peut permettre de préserver le « made in France » dans la mesure où il permet à des entreprises françaises de collaborer entre elles pour réaliser des activités économiques en commun. En effet, le GIE permet à ses membres de mettre en commun des moyens humains, financiers ou matériels pour développer ou faciliter leur activité économique.

lire plus